C’était jour d’automne, ils étaient encore petits
Ces deux hêtres frêles s’étiraient vers la vie
Ils étaient frères et puisaient en harmonie
La sève du terroir aux parfums du pays.
Fier, le bois de Scu exhalait ses essences
Il flattait les pèlerins et charmait leurs sens
Le chemin s’était vêtu de mille couleurs
Pour recevoir dignement le Tour des Marcheurs.
Sur la partition de l’hymne à la forêt
Le vent et les oiseaux avec talent posaient
Les notes apaisantes de la sérénité
La mélodie subtile d’un endroit sacré.
Soudain, emportés par la fraîcheur embrumée
Les roulements des tambours se sont invités
En souvenir de Rolende qui autrefois
De sa présence honora et bénit le bois.
Les deux petits arbres tremblèrent d’émotion
Un peu effrayés par une telle procession
Se tinrent par la main pour bien se protéger
Et faire serment de ne point se séparer…
Le temps a passé. Les deux hêtres ont grandi et se dressent maintenant fièrement au point culminant du Bois de Scu. Ils constituent aujourd’hui une curiosité de notre environnement et, à l’instar du vieux chêne, de la chapelle en souvenir de Barbe Henry et de la potale en l’honneur de sainte Rolende, un élément du patrimoine de notre terroir.
L’orée du Bois de Scu
Mais quel est ce clin d’oeil de la nature?
Sur le panneau didactique dressé à l’orée du Bois de Scu, on peut lire :
« Les hêtres enlacés : en poursuivant votre promenade dans la direction de Fromiée, vous pouvez admirer sur votre gauche deux hêtres « tendrement » réunis par une grosse branche. Elle forme alors une espèce d’arche végétale donnant l’impression que ces deux hêtres ont voulu s’unir pour la vie. Signe du ciel ? Caprice de la nature ? Chacun est libre d’interpréter et de rêver… »
Le panneau didactique
C’est vrai que l’endroit invite au rêve et à la poésie, voire au recueillement pour les Rolendiens. Mais il est une explication scientifique à ce phénomène et la science n’empêche personne de rêver. Ces deux arbres se sont soudés par le contact permanent de deux branches proches l’une de l’autre et qui ont fini par se greffer. On appelle aussi cela des « arbres coalescents ». Alors c’est quoi, la coalescence ?
Les hêtres coalescents
Nous avons, dans la vie courante, divers exemples de coalescence
En physique, on peut citer l’exemple du mercure. Gamins, nous étions fascinés par le comportement du mercure échappé d’un thermomètre médical victime d’une maladresse. Les gouttelettes de mercure, au moindre contact se rassemblent subitement en une seule goutte. On peut aussi observer le même phénomène lorsque les gouttes d’huile fusionnent entre elles sur l’eau. C’est la coalescence physique.
En médecine, lorsqu’une plaie est en voie de guérison, des adhérences se forment entre les lèvres et les tissus se ressoudent. Il s’agit là également de coalescence.
En phonétique, le rapprochement de deux voyelles comme le « a » et le « e » de Laetitia (ah que c’est un bel exemple !), c’est aussi une coalescence.
Soudés pour la vie!
Où sont-ils, ces deux inséparables ?
Pour ceux qui font régulièrement le Tour Sainte-Rolende, la question ne se pose évidemment pas. Mais si vous ne les avez jamais vus, je vous invite à leur rendre visite, la promenade est superbe et le site de l’orée du Bois de Scu mérite le détour. Quant à vous, amis visiteurs du site Gougnies.be, vous pouvez trouver parmi les photos complétant ce dossier un extrait de la carte éditée par l’Administration Communale de Gerpinnes. Lorsque vous pénètrerez dans le Bois de Scu, en venant du village par la rue des Longs Bonniers, un panneau didactique vous offrira quelques détails sur le site. Imaginez le nombre de générations que le vieux chêne a pu connaître, admirez la potale et la petite chapelle et, une centaine de mètres vers la gauche, sur le chemin de Fromiée, vous ferez connaissance avec nos hêtres amoureux. N’hésitez pas à prolonger votre promenade jusqu’à Fromiée et à revenir vers Gougnies par le vieux chemin en cailloux du pays. Lorsque vous croiserez la rue du Petit Fond, vous aurez une vue particulièrement pittoresque sur notre village et le site de ses anciennes carrières. La promenade est fléchée sur la carte.
Extrait de la carte éditée par l’Administration communale de Gerpinnes
Sur le chemin de Rolende dans le Bois de Scu
Le Bois de Scu vu de Fromiée; le même vu du chemin de Fromiée à Gougnies et, deux dernières photos, la descente vers Gougnies.
Photos Jean Marcelle.
Nous n’avons pas l’exclusivité du phénomène
Dans la forêt domaniale de Tricointe, on peut observer la même curiosité. La soudure s’est formée entre deux chênes. Sur le site de Yvoir Nature Faune et Flore (1) vous pouvez, outre de très jolies images de la nature, y trouver « Les arbres soudés en H ». Le responsable du site m’a gentiment autorisé à publier leur photo dans le cadre de ce dossier.
En guise de conclusion, je voudrais dire que nous avons la chance de vivre dans une région formidable, un environnement riche par sa flore et sa faune, un écrin naturel pour y protéger les réelles valeurs d’une vie sereine. Alors prenons-en soin et apprenons à nos enfants à en faire autant.
« Arbres soudés en H » dans la forêt domaniale de Tricointe.
Photo Yvoir Nature Faune et Flore
Jean Marcelle