Ca s’est passé à Gougnies

Imaginez vous tout ce qu’un village comme le nôtre a vécu de mémoire de nos ancêtres… d’une, de deux ou de cent générations… Le dossier que nous ouvrons aujourd’hui ne demande qu’a être complété avec les souvenirs, les documents, les pistes de recherches que vous détenez peut – être et qui nous permettraient d’alimenter cette rubrique de faits étonnants, amusants, intéressants peut-être pour ceux qui se sentent concernés par le passé de Gougnies.

Comment faire la fête à peu de frais…

Nous sommes dans les environs de 1910. Sur la partie droite de la place de Gougnies, en descendant vers l’église habitent, dans deux maisons contiguës (les actuels N°s 17 et 18 qui connurent peu après un triste sort comme on le verra dans un prochain dossier) habitent d’une part Aimé Poncelet et son épouse Emilie André et d’autre part, Alice Poncelet , sœur d’Aimé qui a épousé Emile André, frère d’Emilie.
Comme dans tant d’arrière-boutiques, voire de maisons particulières à l’époque on vend des « petites gouttes » tant chez les Poncelet-André que chez les André-Poncelet et il semble que les deux beaux-frères n’étaient pas les derniers à aimer lever le coude sur le compte de leur fonds de commerce.
Si bien que, connaissant les lascars, un jour où Emilie et Alice durent s’absenter, veillèrent-elles à ne rien laisser comme argent à la maison.
C’était compter sans l’appel de la soif car un des deux drôles eut vite fait de trouver au fond de la caisse un «gros sou» (10 centimes) oublié (1) : de quoi se payer deux « gouttes » , ce qu’il fit en se rendant chez son voisin, chacun en consommant une. Et il paya rubis sur l’ongle avec la pièce providentielle.
Quelques minutes après, muni de son nouveau « fonds de caisse », le beau-frère vint rendre la pareille et paya dûment deux nouveaux verres avant de rentrer chez lui où vint bientôt le rejoindre le voisin altéré. Et, on l’a compris, ainsi de suite….
On dit que quand Emilie et Alice sont rentrées il n’y avait plus une goutte de pékêt dans aucune des deux maisons et que les deux beaux-frères s’étaient payé la cuite la moins chère de l’histoire du village…

Texte rédigé par Ben
(1) »Gros sou » et non « mastoque »: correction apportée suivant le commentaire de Jean Carly ci-après. Merci!

Le ciel nous est tombé sur la tête à Gougnies

Nous sommes en 1868. Depuis septembre 1862, Eugène Bayot, maître de carrière, par ordonnance de la Députation du Conseil Provincial et plan dressé par M. Wauthy, géomètre juré et patenté de Gougnies, obtient l’autorisation de transformer les installations des fours à chaux de Victor Pirmez en scierie de marbre.

Le 11 juillet, sur le site de l’exploitation qui deviendra plus tard « Marmor », un événement scientifique très rare va se produire pour la première fois en Belgique, la formation instantanée d’un tube de verre dans le sable sous l’effet de la foudre : un « tube fulminaire » ou « fulgurite ».

Photo collection Jacques Monnoyer
Une vue, à peu près contemporaine, des bâtiments industriels où le phénomène eut lieu.

Dans le bulletin de l’Académie Royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique, édition 1883, le Docteur A. Van Bastelaer, membre de l’Académie Royale de médecine relate le phénomène dans un article intitulé « Sur un fulgurite formé en présence de témoins à Gougnies près de Charleroi».

…Le 11 juillet 1868, les ouvriers de la carrière de marbre Ste Anne de M. Eugène Bayot à Gougnies étaient à leurs occupations, les uns à l’abri de la pluie qui commençait avec un faible vent de nord-ouest, accompagné d’un fort orage qui venait de se déclarer ; d’autres restés sur le chantier de travail. Ils étaient entourés d’éclairs continus et le roulement du tonnerre ne cessait pas ; « la foudre nous touchait et nous entourait », nous dit un des témoins. L’état atmosphérique était des plus pénibles de puis plusieurs jours : air étouffant, chaleur accablante, absence du moindre souffle de vent, etc.,etc ;circonstances climatiques qui communiquaient à l’homme et aux animaux un état de malaise et d’inertie véritable…

…A un moment donné, un éclair sillonna le ciel, accompagné d’un coup formidable, un craquement sec et court, et tous les ouvriers virent le feu du ciel s’abattre sur la place à quelques pas de l’un d’eux, Emile Nennin occupé à charger un chariot de blocs de pierre. Tous étaient éblouis, presque aveuglés. Un ouvrier nommé Constant Massin qui était au cabestan, grosse construction en fer, fut rejeté au loin sans être blessé par la foudre. Celle-ci traversa une houe emmanchée gisant à quelques pas et fendant l’instrument sur toute sa longueur vint s’éteindre dans un tas de sable destiné au sciage du marbre de la carrière. C’était un amas d’environ 8 mètres cubes de sable jaune-rouge, à gros grains durs, venant de la sablière de la Sarte à Châtelet…

… « Le phénomène avait lieu sous nos regards près de la fenêtre même du bâtiment où nous étions réfugiés à plusieurs …les détails n’échappèrent à aucun de nous…plusieurs étaient même à la porte… » affirment les ouvriers. Emile Nennin constata et fit remarquer à ses compagnons qu’après le coup de foudre, une vapeur se dégagea du sable pendant un temps assez long. C’était sans doute l’eau du sable humide évaporée par la chaleur développée. Les témoins du fait eurent peine à attendre la fin de l’orage pour aller explorer le monticule où le feu du ciel était tombé, tant ils étaient impatients d’y rechercher l’effet de la foudre…

…Le sommet du tas de sable n’était pas sensiblement affaissé et portait à peine une légère excavation conique. Au fond de ce petit entonnoir venait s’ouvrir un tube que l’un des ouvriers, en présence de tous, dégagea d’abord comme il put, en diverses pièces, avec les mains, puis on enleva le reste au moyen d’outils. Il y en avait dans toute la hauteur du sable. Ce tuyau se ramifiait et était d’un diamètre irrégulier et varié dans ses diverses parties. L’embouchure paraissait avoir au moins 2 centimètres et le tube se bifurquait en 2 tronçons qui s’enfonçaient en se ramifiant à la manière des racines…

…Les divers fragments de ce tube furent partagés entre les témoins, emportés par la plupart d’entre eux et égarés ensuite. La principale partie alla à Gougnies et revint dans la suite à Charleroi…


Schémas Jean Marcelle

…Ce tube est de couleur blanche, un peu grisâtre et glacé à l’intérieur, mais rendu mat et même quelque peu rugueux sur cette partie, par la présence d’une multitude de grains de sable soudés, plus ou moins incorporés au tube pendant sa fusion et ayant eux-mêmes éprouvé une fusion de moins en moins complète vers la circonférence. Cette fusion les a rendus aussi de plus en plus gris ou blancs en sens inverse, c’est-à-dire vers l’intérieur. Quelques-uns, les plus externes, ont éprouvé peu de modification et ont même conservé leur couleur jaune ; ils sont simplement agglutinés et se séparent facilement. Ces grains concourent, en somme, à produire comme résultante un aspect blanc mat, ce qui ôte toute transparence au tube, quoique celui-ci soit parfaitement vitrifié, excessivement mince et que la paroi interne en soit complètement lustrée…

…L’effet du coup de foudre a donc été uniquement la vitrification de la matière ; c’est-à-dire la combinaison des éléments qui n’existaient dans le sable qu’à l’état de mélange, la saturation des bases et la formation d’un silicate complexe d’alumine, de chaux et de fer…

Texte rédigé par Jean Marcelle

Sources : Bulletins de l’Académie Royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique 1883.

Merci à Yvan Delporte pour sa documentation.

Pantoufles made in Gougnies…

Les habitants de Gougnies ont toujours été industrieux, parfois dans des domaines qu’on ne soupçonnerait pas…
Et le village en garde un souvenir en la personne du sympathique cordonnier Gaston Nastavnij.
Ses souvenirs sont forcément limités puisqu’il est né en 1930, mais voici ce qu’on peut reconstituer :

Fuyant la révolution d’octobre 1917, un couple russe (1) accompagné de leur domestique arrive dans les années 20 dans un camp de réfugiés à la Panne.

Aux environs de 1924, ces personnes s’établissent à Gougnies toujours accompagnées de leur domestique et ouvrent une fabrique de pantoufles dans les écuries de la ferme située dans la rue des Grands Murs, actuelle propriété du docteur Wauthy. (2) Il semble bien qu’ils ne soient pas les seuls réfugiés russes accueillis à Gougnies, à tel point que l’espace devant la « maison de l’instituteur » au coin des rues de Sart-Eustache et du Bos-le-Comte fut, dit-on, surnommé « Place des Russes ». On atteste notamment la présence d’une famille Mikhaïlov.

Mais revenons-en au couple et à leur « domestique ». Ce dernier est Timophey Nastavnij, il est né en 1892 et a quitté un jour son Ukraine natale pour gagner Saint-Petersbourg où il serait devenu l’ordonnance d’un officier du Tsar. Ses confidences à ses fils Gaston et Milo furent chiches : Timophey n’aimait peut-être pas trop remuer les souvenirs de moments dont il avait la nostalgie…

Bref, le voilà à Gougnies dans la fabrique de pantoufles où, parmi le personnel, se trouvent aussi une Gerpinnoise, Ida Debauche et, embusqué, … Cupidon.
En 1927, le nouveau couple achète la maison N°8 à la rue de la Tourette où naîtront Gaston et Emile. Rêvons : le précompte immobilier réclamé aux nouveaux propriétaires pour la première année est de …16 francs 85 centimes !

Mais la pantoufle ne nourrit manifestement pas son homme, aussi Timophey travaillera-t-il également aux laminoirs de Moncheret à Acoz
Ce que fera d’ailleurs aussi Gaston car, ayant obtenu son brevet de cordonnier au lendemain de la guerre, il se trouve à une époque où l’argent manque pour s’installer et où, de plus, les gens ont la mauvaise idée de porter des chaussures avec des semelles en crêpe qui ne s’usent guère. Donc : laminoir et, après journée, savates.
Mais aujourd’hui, la qualité de son travail tant dans la chaussure que dans l’harnachement équestre sans oublier l’équipement du « marcheur » ainsi que son accueil sont reconnus bien au-delà de Gougnies.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Photos Ben
Texte rédigé par Willy Moreau

Le jeudi 6 juillet 2006 Gaston s’en est allé au paradis des cordonniers…

(1) Ou un couple de Belges, les Plisnier, qui se seraient établis en Russie au début du siècle.
(2) La fabrique de pantoufles aurait également fonctionné dans le « Vieux Château » à l’Escuchau.

Des Francs à Gougnies

Des vestiges d’occupations anciennes ont été trouvés sur le site de l’actuel château «de la Motte» : silex du néolithique, tessons de l’époque gauloise, ouvrages défensifs romains et… deux bractéates franques.
De quoi s’agit-il ? La parole à M. E. Debaille (1)

« Les documents et rapports de notre Société indiquent à la page 202 du tome XVI:  » dans l’enceinte de l’oppidum de Gougnies, on a trouvé les restes d’une tombe franque qui produisit deux broches-bractéates repoussées et portant des traces de soudure sur une plaque de bronze avec ardillon « .
« D’autre part, nous extrayons des mêmes documents (tome XII) : nous n’avons connu le cimetière de Gougnies qu’après sa destruction; mais l’on a, dans l’enceinte même de l’oppidum, trouvé les restes d’une tombe franque qui produisit deux broches- bractéates repoussées et portant des traces de soudure sur une plaque de bronze avec ardillon, le tout du cachet le plus barbare. »
« L’une de ces broches-bractéates est en or et offre la plus grande ressemblance avec un objet trouvé au cimetière franc de Rosée (Province de Namur) (…)
Bractéate : les numismates modernes ont adopté ce nom pour désigner des monnaies composées d’une simple pellicule d’or ou d’argent empreinte, par estampage, sur un poinçon en relief, d’un seul type en relief d’un côté et en creux de l’autre. Au Moyen-âge, l’usage monétaire en a été fort répandu dans l’Allemagne et dans les pays Scandinaves ».(…)
L’auteur de l’article a dessiné les deux bractéates et en donne cette description :« Broche-bractéate en or repoussé, ornée, sur le pourtour de demi perles noires d’une substance ressemblant étonnamment au jais naturel; les autres décorations des cercles intérieurs sont des demi sphères repoussées. Au centre, les traits grossiers d’une figure fruste, vue de face, encadrés de demi sphères identiques aux précédentes, trois à la tête et trois sur chacun des côtés. »« Cette broche est en partie abîmée ; les bords disparus sont figurés en noir.
Cet objet en argent est divisé en quartiers dans chacun desquels est représenté un oiseau ainsi que des motifs d’ornementation que nous avons reproduits. Tous ces ornements sont dus au repoussage du métal.
Les oiseaux décoratifs à bec crochu (aigles. faucons, gypaètes) furent non seulement en honneur chez certaines tribus de la Scythie avant d’avoir été adoptés par les Goths, mais le baron de Baye en a même retrouvé les prototypes en Sibérie Orientale. Les sujets à animaux fantastiques sont encore un emprunt fait à l’Orient. (…)
Si l’on tient compte que ces deux bractéates étaient fixés à des plaques en bronze munies des mêmes moyens de fixation que ceux d’une agrafe, on peut affirmer qu’il s’agit bien ici de fibules franques »

conclut l’auteur.

(1) Documents et rapports de la Société royale paléontologique et archéologique de l’arrondissement judiciaire de Charleroi. Tome XXXXII, 1937.

Un pâté de canard chez le docteur

Nous sommes au printemps 1965. Le renouveau de la nature met du soleil dans le foyer de monsieur et madame Voudipa (je vous le dirai plus tard) et donne à ce couple bien de chez nous l’irrésistible envie d’inviter des amis. Ce sera dimanche et l’ambiance de la fête de Pâques apporte à la maîtresse de maison les idées de menu aux parfums de la saison. Pour l’entrée froide, une savoureuse recette de pâté de canard est élue à l’unanimité et, pouvant être réalisée quelques jours à l’avance, hérite de la première place dans le programme des préparatifs.

Le canard, ayant subi les transformations culinaires qui le rendent parfaitement méconnaissable, a rendez-vous, ainsi qu’un alléchant cortège d’épices et agréments aux diverses saveurs, avec la technologie fraîchement promue dans les pavillons de l’Expo 58 : le robot électroménager, cet instrument de torture qui, outre les aliments les plus récalcitrants, s’attaque aussi aux oreilles de tous les membres de la famille présents dans la maison pendant l’opération.

Malgré les performances indéniables de l’engin, les morceaux de canard semblent par moment résister au rotor garni de petites lames censées hacher la viande avec la plus grande facilité. Bien consciente que vouloir accélérer l’opération avec les doigts présente un sérieux danger pour ceux-ci, la cuisinière se munit d’un petit couteau de cuisine pour convaincre les morceaux indisciplinés de l’intérêt de cette métamorphose pour la qualité du futur pâté.
La lame du petit couteau est en acier trempé et la pointe de celle-ci, à peine en contact avec le hachoir en rotation émet le petit « clac » caractéristique d’un départ inopiné et définitif.
Le petit ustensile de cuisine a maintenant perdu son pouvoir acéré comme la mâchoire d’un enfant dont la première incisive attend sur l’oreiller le passage du confiseur déguisé en souris.

Oui mais voilà ! Où est la pointe ? A cette question, Sherlock Holmes eût répondu : « élémentaire, mon cher Watson, elle est dans le haché ! » Et bien, monsieur le détective, tout perspicace que vous soyez, sachez que l’enquête est loin d’être terminée et que l’histoire va prendre une tournure hitchcockienne.
Après avoir examiné à plusieurs reprises, avant, pendant et après le nettoyage, le mécanisme du robot fidèle à sa réputation, la maîtresse de maison n’a toujours pas retrouvé le petit morceau d’acier. Elle entreprend alors avec minutie et une fourchette l’examen approfondi du mélange issu de l’appareil et, après avoir réitéré plusieurs fois l’opération, constate que le résultat s’avère obstinément négatif. Mais où est cette fichue pointe de couteau ?

En répartissant le haché dans la terrine destinée à la cuisson, la cuisinière l’examine à nouveau avant de le placer dans le four qui ne mettra guère de temps à livrer ses premières appétissantes exhalaisons.
Pendant que le canard se fait bronzer sur la grande plage du fourneau, le robot est une fois encore inspecté avant de retrouver la place qui lui est réservée au parking des ustensiles
Désespérément, la dent de fer ne brille pas par sa présence, elle a décidé d’éprouver les nerfs d’une cuisinière progressivement empreinte d’une réelle angoisse.

Il est certain qu’à l’instar de certaines figurines farfelues dissimulées à l’Epiphanie dans la galette des rois et susceptibles d’entraver sérieusement le trafic au niveau de la luette des enfants gourmands, notre petit triangle métallique pourrait lors de la dégustation du pâté constituer une désagréable surprise pour le convive alors proclamé roi des malchanceux…

De retour au domicile, après avoir exprimé à son épouse son enthousiasme par rapport aux effets salivants du parfum de son pâté, le père de famille est mis au courant de l’affaire du couteau, des investigations, des résultats de celles-ci et de l’inquiétude grandissante de l’enquêtrice.
Avec la logique d’un technicien, c’est l’ingénieur qui trouve le moyen de rasséréner son cordon bleu :
« La meilleure façon de s’assurer de l’absence de métal dans ce pâté, c’est de le faire passer aux rayons X ! »

Madame en reste bouche bée :
« Ah bon ? »

A Biesme, le docteur Joseph Wauthy vient de s’équiper d’un appareil de radioscopie. Pour l’heure des consultations du soir, le pâté sera cuit, refroidi et cliniquement transportable. Elle est là, la solution !
Et voici notre chef de famille responsable, assis dans la salle d’attente du médecin avec, sur ses genoux, non pas un gamin en culottes courtes attendant bien sagement parce qu’il est avec son papa, mais une terrine de canard précieusement enveloppée dans un drap en toile de vichy exhalant des odeurs inhabituelles dans cette atmosphère médicale.

« Au suivant ! »
La porte du cabinet à peine franchie, le protecteur de la terrine, bien connu du toubib, se fait interpeller par celui-ci :
« C’est toi ? Qu’est-ce qui se passe ? Tu es malade ? »
« C’est pas pour moi, c’est pour lui ! »
« Qui ça, lui ? »
« Ben lui, le pâté de ma femme ! »
« Tu rigoles ou quoi ? »

Après quelques mots d’explication, le brave médecin, mort de rire, emmène le pâté et son « papa » devant l’imposante installation de radioscopie.
Le diagnostic est rapide et catégorique :
« Il n’y a pas le moindre bout de métal dans cette terrine ! »
« Tu es bien sûr ? »
« Absolument, regarde ! »

Le médecin place derrière le pâté une aiguille de seringue. Sur l’écran, elle apparaît nette et précise. Incontestablement, la pointe du couteau n’est pas dans le pâté..

J’ignore si le bon sang qu’il s’est payé a suffi pour régler la consultation, mais c’est un toubib hilare qui raccompagne le pâté à la porte de la salle d’attente, devant des patients en proie pour longtemps à de sérieuses questions.

De retour à Gougnies, la terrine retrouve alors aux yeux de sa conceptrice toutes les couleurs de la santé et les promesses de saveurs d’une table digne de ses invités.
La pointe du couteau ? On ne la retrouvera jamais, mais il est certain qu’elle n’a squatté aucun tube digestif et il est plus que probable qu’elle fut, avec les déchets de canard évacués du robot, simplement jetée à la poubelle.

Cette histoire, elle est authentique et a bien fait rire les convives en dégustant ce pâté de printemps 65. Je vous l’ai racontée avec une certaine émotion car cet honorable chef de famille capable de braver le ridicule pour sauver le pâté de son épouse, c’était mon papa !

Texte rédigé par Jean Marcelle