Au cours de la guerre 40-45, Pierre, né à Gougnies 4 ans avant le début de celle-ci, rejoint avec ses parents la famille ardennaise. C’est au collège de Carlsbourg que les premières fourmis de la compétition vont lui chatouiller les mollets. En effet, le professeur de gymnastique organise des épreuves d’athlétisme au sein de l’école et remarque chez Pierre une incontestable aptitude à la foulée sportive. Il lui suggère donc de continuer à s’entraîner.
De retour à Gougnies, Pierre consacre ses temps libres à la musculation de ses jambes en courant dans toutes les circonstances possibles. Le chêne du centenaire et ses balises de pierre lui servent quotidiennement de chicanes pour la souplesse de ses changements d’appui en course. La campagne et l’orée du bois lui offrent le terrain idéal pour améliorer ses performances dans la discipline du cross country.
A 17 ans, il s’inscrit avec son frère Arthur dans l’équipe scolaire d’athlétisme du Sporting de Charleroi. Il participe d’emblée aux 3 courses préparatoires au cross populaire du journal « Le Soir » organisé sur la plaine d’Evere. A chacune de ces courses, il termine troisième.
Sa première victoire, Pierre la décroche à la course internationale de Sombreffe. Il monte sur le podium avec Jean-Pierre Deloye qui deviendra international avec un certain Gaston Roelandts. Pierre devient alors champion du Hainaut des scolaires sur piste et en cross.
Photos, de g à d. Equipe de cross du Sporting de Charleroi en 1955, 1ere division. En bas, de g à d: (5e) Arthur et (6e) Pierre Nollevaux. Pierre au cross du Journal "Le soir" à Evere en 1955. Entraînement de juniors du Sporting. Pierre Nollevaux et Marcel Delforge, champions de Belgique sur 5.000 m. Tous les athlètes du Sporting au 50e anniversaire du club. En bas, de g à d: (6e) Pierre et (7e) Arthur Nollevaux.
Photos collection Pierre Nollevaux
Lorsqu’à 18 ans il rejoint la catégorie des juniors, il remporte à nouveau le championnat. Ce titre, il le conserve, et deux ans plus tard fait brillamment son entrée dans le monde des seniors. Jolie manière de fêter ses 20 ans !
Dès sa première année en seniors, il participe au traditionnel cross du journal « Le Soir » et des 400 coureurs qu’il avait côtoyés en scolaires, seulement 4 s’y retrouvent dans leur catégorie.
De g à d: première victoire à la course internationale de Sombreffe avec Jean-Pierre Deloye. Cross de Châtelineau en 1958. Pierre (au milieu) termine 3e. Pierre avec le dossard N°1 de champion du Hainaut.
Photos collection Pierre Nollevaux.
Jeune marié, Pierre travaille comme fondeur d’abord et contremaître ensuite à Hainaut-Sambre. Eté comme hiver, il part au boulot le matin et rejoint Gougnies le soir …en courant ! Excellent entraînement quotidien.
Un jour de congé, en hiver, Fina Goffaux aperçoit à l’entrée du bois un homme à moitié nu qui court comme un dératé dans tous les sens. Inquiète de ce manège, elle prévient sans tarder l’irremplaçable police de proximité qu’était à l’époque notre Jules Lefèvre souvent regretté.
L’appel du devoir précipite celui-ci à l’orée de la forêt, bien décidé à interpeller l’original et lui demander de quel établissement il s’est évadé. Pas de caméra cachée mais une partie de franche rigolade fait rapidement le tour du village ! Il est vrai qu’alors le jogging n’est pas de mode et le port du short et du singlet peut surprendre sur un sol enneigé. « Mais enfin, Fina, c’est Pierre qui s’entraîne ! »
Au cross de Lessines, si Pierre n’est pas superstitieux, il se sent un peu nerveux. En effet, le short qu’il enfile à chaque course n’étant pas opérationnel, celui qui protège alors son intimité est pour lui un étranger. Avant la fin de la course, la culotte béotienne le trahit par l’élastique et l’athlète doit son pudique salut à une épingle de sûreté furtivement prêtée par un concurrent ayant abandonné. La mise est sauvée mais pas le podium. Maudite culotte !
Au nocturne du Heysel, course sur piste de 3000 mètres, Pierre se classe troisième derrière Van Bastelaer et Jean-Pierre Deloye. Le vainqueur est disqualifié par les juges parce que son maillot n’est pas réglementaire. Au lieu de la tenue officielle du sponsor, le coureur porte un singlet avec la marque « petit bateau » ! Par solidarité, Deloye et Pierre refusent de monter sur le podium. Ils sont suspendus ! C’est donc le quatrième de la course qui remporte celle-ci. Excès de zèle qui coupe celles des athlètes qui s’envolent vers la victoire !
En 1964, après avoir remporté trois années d’affilée le championnat du Hainaut, Pierre se trouve face à une pénible réalité : il souffre du diabète. Les médecins sont catégoriques, il a besoin de toutes ses forces pour lutter contre la maladie tout en conservant son travail. C’est pour lui une énorme désillusion mais il doit se résigner à abandonner la compétition.
Durant toutes ces années de résistance à ce mal insidieux, Pierre trouve sa force et sa détermination dans les leçons indélébiles de l’école du sport et la connaissance de soi par la pratique de la compétition.
Texte rédigé par Jean Marcelle