De verre et de lumière (1)

En cette période d’après fêtes, où le calme se réinstalle, où en ce jour de l’Epiphanie on se retrouve à partager en famille la galette des Rois, Gougnies.be ouvre un nouveau dossier, j’ai même envie de dire, un beau livre d’images.

Nous vous invitons à le lire pour découvrir ou redécouvrir ce beau patrimoine que sont les vitraux qui ornent l’église de notre village.
Et, dans le même temps, à faire connaissance avec Jean-Baptiste Capronnier et Adrien Joseph Osterrath, les maîtres verriers qui ont œuvré à ce bel ornement. Le premier a réalisé deux des vitraux, le second est l’auteur des dix autres.

L’église en 1919 (coll.Jacques Monnoyer) et de nos jours (photo Arnaud Tombelle)

L’église a remplacé la chapelle primitive, sise à la rue du Culot, érigée en vicariat en 1753.
De style semi – ogival, l’église dédiée à St Remi a été construite en 1852 /53 sur l’emplacement d’un cimetière « Franc » découvert lors des fouilles en 1831.

Voir ces dossiers: «Bref aperçu de l’église de Gougnies» rédigé par Willy Moreau et
« l’église au milieu du village » rédigé par Jean Marcelle et illustré par Arnaud Tombelle

Les premiers vitraux installés dans l’église datent bien évidemment de la construction de celle-ci et sont réalisés selon la technique de la « Vitrerie »

Vitrail avant 1930 et détail de l’aspect d’une vitrerie. Photo coll. Comité de la Marche royale sainte Rolende de Gougnies.

La vitrerie est un vitrail dont le dessin des plombs est géométrique. Souvent clair et sans peinture celui-ci assure un très bon éclairement de l’édifice. Ces motifs permettent une répétition géométrique du dessin.
Nous reviendrons plus en détail sur la « Vitrerie » dans la partie technique de ce dossier.

Les années trente apporteront restauration et investissement dans le remplacement des vitreries par des vitraux d’ornementation avec des sujets religieux.

Vitraux et maîtres verriers

XIX ème siècle

Jean-Baptiste Capronnier (1814-1891)

Le Baptême de Clovis, don du Baron Henry Pirmez. Ce vitrail représenterait des natifs de Gougnies avec saint Remi, patron de la paroisse.
A droite: apparition du Sacré-Cœur à sainte Marguerite-Marie.

Jean-Baptiste Capronnier, fils de François, est un peintre verrier d’origine française, né à Paris le 1er février 1814 et décédé à Schaerbeek le 31 juillet 1891.

Son principal mérite est d’avoir rénové et remis à l’honneur un art négligé en Europe durant un siècle : celui de la peinture sur verre, en d’autres mots les vitraux. Jusqu’au début du XIXe siècle, on était parfois contraint de restaurer les verrières avec de la peinture à l’huile!

C’est son père, François Capronnier, ancien artisan, décorateur et doreur à la Manufacture royale de Sèvres, qui, dans les années 1820, vint se fixer à Schaerbeek, parce que la réputation de notre pays dans ce domaine fut grande dans le passé.
Il commença donc par des recherches afin de retrouver le savoir-faire d’autrefois et obtient dès 1828 un brevet du roi Guillaume Ier des Pays-Bas. En fait les techniques du vitrail avaient été largement perdues et c’est par l’intermédiaire de la céramique que le vitrail est redécouvert.

C’est à partir de 1840, quand Jean-Baptiste en reprend la direction, que l’atelier Capronnier prend un essor considérable. Leurs vitraux ornent nombre d’églises et cathédrales du pays; ils se sont aussi largement exportés.

Il faut également préciser que Jean-Baptiste Capronnier sut s’entourer, pour la réalisation de ses cartons de vitraux, d’artistes réputés comme Charles De Groux, Constantin Meunier, François Joseph Navez.

Jean-Baptiste Capronnier et Bruxelles

De nombreux vitraux signés Capronnier ornent la Cathédrale saints Michel et Gudule à Bruxelles.
Il a habité rue Rogier n° 246, puis n° 251.
Une rue de Schaerbeek lui est dédiée, la rue Capronnier ; elle se prolonge par la rue François-Joseph Navez, qui fut son collaborateur.

Jean-Baptiste Capronnier fut le rénovateur du vitrail en Belgique et eut une renommée internationale.
On lui doit la restauration de la plupart des verrières anciennes de notre pays.

Chronologie des ateliers Capronnier :

– François Capronnier (1779-1853) dirige l’atelier de 1829 à 1839
– Jean-Baptiste Capronnier (1814-1891) dirige l’atelier de 1839 à 1891
– Jules Adrien Capronnier (1838-1914) associé en 1892 à François Ambroise Comère jusque fin 1910
– En 1910 – rachat des ateliers Capronnier par les frères Wybo Camille et Arthur.
– En 1970 rachat des archives par Roger Coppe et fils.

XX ème siècle

Adrien Joseph Osterrath (Tilff 1878 – Liège 1958)

Détails de trois des vitraux réalisés par Adrien Joseph Osterrath: l’Annonciation, la tentation dans le désert et les clés du royaume.

Adrien Joseph Osterrath est le fils de Joseph Osterrath (1845-1898) maître verrier et peintre sur verre d’origine prussienne né à Magdebourg.
Entre 1872 et 1930, l’atelier verrier belge le plus productif est sans contexte celui de Joseph Osterrath, père et fils.

Un peu d’histoire :
Après une période passée comme élève dans les ateliers de Jean-Baptiste Béthune à Gand, Joseph Osterrath fonde son propre atelier à Xanten, dans le Bas-Rhin.
Après la guerre de 1870, Bismarck instaure un climat hostile aux catholiques. Osterrath est contraint à quitter l’Allemagne et s’installe à Tilff. Son atelier se développe et les commandes affluent de Belgique, Hollande, France et encore d’Allemagne.

A la mort de Joseph, en 1898, c’est son fils Adrien Joseph, qui lui succède. Le succès est international. En 1908, une brochure publicitaire mentionne des représentants de la maison Osterrath dans l’Europe entière, mais aussi en Australie, au Chili, au Mexique, …
En 1922, Joseph Osterrath Jr s’associe à un verviétois, André Biolley et l’entreprise prend le nom de Osterrath et Biolley. Elle s’installe alors à Liège, au n° 4 de la rue de l’évêché.

L’entreprise reste très florissante pendant l’entre-deux-guerres. La production cesse en 1966.

Le nez en l’air
Visite guidée de l’ensemble des vitraux qui ornent l’église en démarrant par la nef gauche.


1. La Sainte Famille, (Osterrath) don de la paroisse en 1936;
2. La fuite en Egypte, (Osterrath) don de la famille Enseval-Ninnin en 1936;
3. La crèche de Bethléem, (Osterrath) don de l’abbé Taminiaux en 1935;
4. L’annonciation avec l’ange Gabriel, (Osterrath) don de la famille Wiart-Massart;
5. Apparition du Sacré-Cœur à sainte Marguerite Marie. (Capronnier)

De part et d’autre du choeur, des vitraux composés de rosaces (Osterrath)


A votre gauche en revenant vers l’entrée:
1. Le baptême de Clovis (Capronnier) (ce vitrail représenterait des natifs de Gougnies avec saint Remi, patron de la paroisse) don d’Henri Pirmez .
2. La tentation dans le désert, Jésus et un ange lui apparaissant, (Osterrath) don de la paroisse en 1937;
3. Pierre et Jésus lui remettant les clés du royaume, (Osterrath) don de la famille Wauthy-Dincq en 1938;
4. Les noces de Cana, (Osterrath) don de la famille Minet-Noel en 1937;
5. Ce vitrail (Osterrath) a été offert en 1934 par M. Edmond Daffe de Gougnies et Mme Laure Wauthy. Il est consacré à sainte Rolende. On peut y reconnaître l’abbé Taminiaux, Augustin Beaurain (enfant de chœur), le caporal sapeur Hubert Douillet et le sapeur Edmond Daffe.

Gros plans sur le dernier vitrail

Pour terminer ce chapitre sur la présentation de notre patrimoine de verre et de lumière, et en prélude au dossier technique qui viendra le compléter dans le futur, j’aimerais vous livrer un extrait du livre de Bernard Tirtiaux « Le passeur de Lumière ».

Rosal de Sainte-Croix s’adresse au jeune Nivard de Chassepierre:

« … La lumière est diffuse, elle est fugace, changeante, capricieuse. Elle a toutes les ruses.
Jamais tu ne seras satisfait de ton ouvrage, si beau soit-il. Jamais tu n’auras assez de couleurs dans tes casiers pour donner vie à un vitrail comme tu le souhaites, jamais tu n’auras la certitude de colorer juste comme on chante juste.
Qu’importe ! Tes pas partent du feu et tu dois atteindre le feu, devenir maître de ton art. »

Texte et photos (sauf autre mention)
Rita Beaurain


Sources :

Institut Royal du Patrimoine Artistique – Kikirpa – Isabelle Lecocq –
Conférence « La symbolique des vitraux » de Christian Pacco pour les verriers Capronnier et Osterrath.
Texte extrait du Passeur de lumière de Bernard Tirtiaux. – Chapitre 8 Page 120 Edts Folio – 2688

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