Heures de guerre (5)

Une belle histoire d’amour au milieu des horreurs de la guerre.

Pierre Lebordais et Célina Chenu à l’époque de leur mariage

Quand, au matin du dimanche 23 août 1914, les troupes allemandes pénètrent dans Gougnies et massacrent de malheureux blessés français soignés dans les dépendances du Château Piret, l’hôpital de campagne installé par les Français à la limite de Biesme au Château Toussaint a été évacué depuis la veille.
Devant l’avance allemande, les blessés français de la bataille de la Sambre ont été transportés à Oret d’où un train les a ramenés au pays.
Parmi eux, un jeune lieutenant de 24 ans, Pierre Lebordais originaire de la région du Mont Saint Michel. Touché au bras lors de combats à Aiseau, le 22, il avait été transporté à l’hôpital le jour même à 8 heures. A 16 heures il était évacué. Huit heures de temps : c’est largement suffisant pour un coup de foudre et c’est ce qui se passa entre le militaire et la jeune infirmière qui s’occupait si bien de lui, Célina Chenut, 25 ans, de Biesme.
Au moment de se quitter, ils jurèrent de s’épouser s’ils survivaient à la guerre et c’est ce qui se passa : Célina et Pierre sont les grands parents de Bernard Thiry qui conserve précieusement différents souvenirs de son aïeul.

Un homme d’une fameuse trempe ce Lebordais, comme en témoigne les citations dont il fut l’objet et qui lui valurent la Légion d’honneur.

Nous le retrouvons à l’hôpital militaire de Rennes où son régiment, le 25eme d’Infanterie est caserné. Sa blessure guérie, c’est le retour au front, dans l’enfer de Verdun cette fois. Comme en témoigne sa première citation, un an après le voici à nouveau blessé alors qu’il repoussait un assaut ennemi.
La guerre prend fin tandis qu’il est sans nouvelles de Célina et, de Rennes, en février 1919, il lui écrit une lettre et précise dans l’adresse « si elle est toujours en vie ». En août de la même année, démobilisé sans doute, le voici de retour à Les Loges Marchis (Saint Hilaire de Harcouët) dans sa famille d’où il écrit encore à sa « petite fiancée chérie » et lui dit toute la hâte qu’il a de revenir « au pays de sa petite nana », ce qu’il fera puisqu’avant la fin de l’année ils s’épouseront à Biesme le 15 octobre.

Rendu à la vie civile, Pierre Lebordais était devenu chef de bureau aux usines Hainaut – Sambre à Couillet, mais il était dit qu’une vie paisible n’était pas faite pour lui puisqu’en 1940 il fut mobilisé en tant que réserviste. Il termina la guerre avec le grade de capitaine.
Cet homme hors du commun est mort à Biesme le 18 juillet 1975. Célina lui survécut 16 ans.

Ben

Parmi les souvenirs conservés par Bernard Thiry, le document reprenant les citations qui lui valurent la Légion d’honneur, la lettre à sa « petite fiancée chérie », une plaque de cuivre et son képi.
Photos coll.Bernard Thiry

Voir aussi
14-18: la vie à Gougnies